Laura Millet


DNSEP Art, 2021 - 2022


« Enfant, je passais mes week-ends et mes vacances chez mamie Daniele et papi Jean-Michel. C’était une grande maison, où tout était en ordre.

D’un côté, il y avait tous les objets précieux que l’on ne devait pas toucher, c’était les jouets de mamie. Ils trônaient dans l’espace à des points stratégiques, là où la lumière les mettait en valeur. D’ailleurs, le porte-parapluie ne portait pas de parapluie, la fontaine ne crachait jamais d’eau et la potiche contenait des fausses fleurs. Tous faisaient office de décor.

Puis, de l’autre côté, il y avait nos jouets à nous. Mon préféré était le tapis. Un tapis avec des routes dessinées, un rond-point au centre, une école, une station essence, une usine, un immeuble, une maison et un peu de verdure. Deux choses me fascinaient dans ce tapis : les barrières blanches qui étaient placées un peu partout dans le paysage et les reflets sur les fenêtres de chaque bâtiment. J’ai toujours aimé les reflets. Les jouets de mamie aussi avaient des reflets, ils brillaient à la lumière et avaient des silhouettes qui se suffisaient à elles-mêmes.

Ma pratique s’articule autour de la peinture et de l’installation. Elle prend comme point de départ les souvenirs, l’enfance et le sentiment de mélancolie ou de déception qui peut en découler une fois adulte.

Trop petits ou trop plats pour jouer, je crée des décors dans lesquels l’illusion ne fonctionne qu’à distance et où le spectateur se retrouve constamment rejeté sur le seuil.

Avec ces espaces convoquant des éléments de jeux mais qui ont constamment l’air figés, vides et dénués de figure humaine, j’appuie sur une ambiguïté perpétuelle entre amusement et interdit. »